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Colloque de jeunes chercheur·euses ÉCrI (Éducation, Créativité et Identité) Amiens — 20 et 21 mai 2025
À l'initiative de chercheur·euses du Centre Amiénois de Recherche en Éducation et en Formation (CAREF), ce colloque propose de questionner des enjeux qui concernent les sciences de l'éducation et de la formation à travers une approche interdisciplinaire et collaborative. L’événement constitue une occasion unique de se rassembler et de réfléchir ensemble aux liens entre éducation, créativité et identité. A travers cette rencontre, nous voulons permettre la mise en relation d’experts, de chercheur·euses et de doctorant·es autour d’un but commun : la création d’un havre de partage et de réflexion critique autour des systèmes éducatifs. Dans le cadre de nouveaux tests pour les classements PISA, l’étude de C. De Smet, M-B. Răileanu et M. Romero indique que : « l’évaluation de la pensée créative est désormais intégrée [...] dans le monde de l’éducation » (OCDE, 2017). En 2020 et sur la base des travaux de G. Comeau (2004) et A. Dirani (2016), les trois chercheuses susmentionnées constateront que si « la créativité apparaît comme indispensable dans le monde anglo-saxon, cette compétence est relativement méconnue et moins développée dans le monde francophone » (p. 590). Nous observons dans le même temps que l'Éducation Artistique et Culturelle (EAC) a fait l’objet d’un traitement de plus en plus important, notamment de la part de l’UNESCO et de l’Union européenne qui considèrent qu’il s’agit là d’une composante transversale pour l’ensemble des disciplines scolaires dans l’optique de favoriser des méta-compétences telles que « la créativité, la pensée critique et la sensibilité » (Chabanne, 2024, p. 24-25), des compétences que chaque individu devrait, selon ces organisations, nécessairement avoir intériorisé à l’issue de leur scolarité obligatoire. Or, l’évaluation de l’acquisition et donc, de la transmission de celles-ci, reste « difficilement formalisables, élémentarisables et programmables » (Chabanne, 2024, p. 27) au sein de l’institution éducative. C’est pourquoi nous souhaitons interroger la capacité et la légitimité de l’École à stimuler et à évaluer la créativité dans le domaine de l’éducation (et/ou au sein du système scolaire). Cela implique de porter une attention à la manière dont la prise en charge (ou non), par l’institution scolaire, de la stimulation et du développement de ces nouvelles compétences via certaines activités pédagogiques spécifiques, peut contribuer à (re)définir les identités individuelles et collectives. Toutefois, cette injonction à développer la créativité interroge à son tour les finalités mêmes de l’institution scolaire : doit-elle redéfinir ses méthodes, ses contenus – voire son identité – pour répondre à cette exigence ? Aussi, cette prise en charge institutionnelle pose la question de savoir comment cette (re)définition influence la manière dont les élèves la manifestent, la maîtrisent et en font usage. Se pose alors la question de l’éveil des dispositions créatives, de comment elles s’acquièrent, se transmettent ou s’héritent. Enfin, dans un contexte où « les mutations et les crises engendrées par la globalisation libérale ne sont pas sans effets sur l’école » (Dubet, 2010), nous essayerons d’analyser la manière dont la créativité peut offrir des perspectives d’accompagnement à ces mutations. Dans ce contexte, l’éducation est à envisager comme un processus par le truchement duquel les individus (se) réfléchissent tout à la fois en tant qu’acteur·ices et qu’agent·es de la société, produits et producteur·ices de relations de pouvoir, façonné·es par et façonnant concomitamment leur(s)/les identité(s) personnelle(s) et collective(s). Dans cette perspective, la constitution identitaire renverrait « à une triple dimension des objectifs assignés à l’école: construire un sujet pensant et agissant, construire un élève rompu aux codes didactiques en vigueur, construire un être de parole(s) existant dans l’interlocution » (Demougin, Sauvage, 2010); des objectifs qui, peut-être, pourraient être atteints si (ou qui nécessitent que) l’institution scolaire (membres et partenaires) cherchait à cultiver la créativité. Dès lors, plusieurs questionnements émergent : quels types d’identités la créativité participe-t-elle à affiner, voire à faire émerger ? La créativité est-elle indispensable au processus identitaire ? La construction de l’identité (individuelle et collective) par l’éducation peut-elle se réaliser sans faire usage de créativité ? La créativité peut-elle et doit-elle être enseignée pour se manifester, se développer, être stimulée ? Sous quelles formes cette créativité se manifeste-t-elle ? Comment peut-elle (ou doit-elle) être mise en œuvre ? Quels sont les groupes les plus disposés à en user ? Les activités pédagogiques créatives peuvent-elles servir de catalyseurs pour faciliter l’adaptation aux crises et/ou mutations sociales ? Quelles sont, finalement, les finalités d’une éducation créative ? Identité et créativité pouvant semble-t-il, s’influencer réciproquement – comme objet ou sujet de l’autre –, cela nous conduit à proposer trois axes de réflexions aux communicant·es autour desquels devront s’articuler leurs travaux :
Axe 1 : Créativité et construction identitaire dans les pratiques éducatives :
Ce premier axe explore la façon dont les pratiques éducatives favorisent ou contraignent l’émergence d’une créativité authentique et, comment celle-ci accompagne la construction identitaire des apprenants. Que ce soit au cours d’activités artistiques, sportives ou manuelles, les élèves sont amené·es à se positionner face aux normes sociales et pédagogiques. Ce processus de construction identitaire est davantage marqué à l’adolescence, moment clé de quête de soi et de reconnaissance par la société. Comme l’écrit D. Marcelli (2023), l’enjeu de cette « énergie » mander par la créativité serait pour l’adolescent d’apprendre à être par lui-même: « il pourra exister, ex sis terre, “sortir de sa place” d’enfant pour être un individu reconnu dans l’espace social ». Les propositions pourraient amener une réflexion sur les expériences corporelles, artistiques et éducatives permettant de rompre avec les normes traditionnelles et d’inventer un espace où la subjectivité et l’expression créative peuvent s’épanouir. Le but est de comprendre comment la créativité, souvent perçue comme un acte individuel, peut devenir un procédé collectif de réinvention de soi, notamment dans les milieux scolaires et éducatifs : « c’est seulement en étant créatif que l’individu découvre le soi » (Winnicott, 1971, p. 6).
Axe 2 : Ambiances et environnements institutionnels: vers une transformation pédagogique ?
Ce deuxième axe s’intéresse aux environnements dans lesquels les pratiques éducatives s’inscrivent et à leur rôle dans la facilitation ou la limitation des processus d’apprentissage et de développement personnel. Les ambiances, qu’elles soient sociales ou institutionnelles, ressenties dans l’instant ou plus tard, impactent les dynamiques pédagogiques et les identités en construction. Ce volet permettra de souligner comment ces expériences influent sur les vécus et influencent la réussite des apprenants. Sous la pression des réformes institutionnelles et des politiques publiques, les universités se
voient enjointes d’adopter des approches centrées sur les compétences et la professionnalisation, la transformation pédagogique et/ou l’adaptation à de nouvelles formes pédagogiques qui posent la question de l’espace accordé à la créativité et de la manière dont les institutions doivent innover pour respecter les identités de chacun.
Axe 3 : Politiques éducatives et (re)production de (nouvelles) formes d’identités individuelles et collectives
Ce troisième et dernier axe aborde le sujet de l'identité sous un angle élargi, en examinant le rôle que peut jouer et que joue l'École, les enseignant·es et les curricula dans l’accompagnement des mutations sociales et culturelles. Il s’agira de nous questionner sur la manière dont les politiques éducatives, en cherchant à modifier les comportements ou les dispositions des élèves, peuvent contribuer à renouveler nos modes d’être au monde « avec l’ambition de projeter la société dans une perspective prédéfinie » (Charlier & Croché, 2017, p. 120). Ainsi, les institutions éducatives seront ici, étudiées comme des espaces de (re)production des (nouvelles) formes de subjectivités et d’identités collectives, mais aussi comme des lieux où les normes imposées par les politiques sont réappropriées, transformées ou contestées par les acteur·ices concerné·es. Il s’agira alors de questionner la manière dont la stimulation ou l’usage régulier de la créativité peut influencer l’adoption, par les élèves et les enseignant·es, de comportements, de normes et de valeurs dans un contexte de transformations individuelles et collectives. Enfin, se pose la question du rapport entre identité et créativité : à savoir si la première constitue un frein ou un levier à l’expression de la seconde et, à l’inverse, dans quelle mesure cette expression (ou cet usage) de la créativité peut affecter, voire redéfinir les identités.
Bibliographie
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Barbot, B., & Lubart, T. (2012). Adolescence, créativité et transformation de soi. Enfance, 3(3), 299-312. https://doi.org/10.3917/enf1.123.0299
Bertin-Renoux, A. (2020). La créativité en éducation physique: entre expérience(s) et instrumentalité (1960-2020). Université de Bretagne occidentale, Brest.
Brun, A. (2018). Aux origines du processus créateur. Erès.
Capron Puozzo, I. (2016). Créativité et apprentissage: dilemme et harmonie. Revue française de pédagogie, 197(4), 5-12. https://doi.org/10.4000/rfp.5130
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Charlier, J.-É., & Croché, S. (2017). Résistances, esquives, ruses et réappropriations: jeux de dupes et production collective de la doxa en éducation. Éditions De Boeck Supérieur, 119-135.
Comeau, G. (1995). La créativité en éducation: importance de la compétence disciplinaire. McGill Journal of Education / Revue des sciences de l’éducation de McGill, 30(3). https://mje.mcgill.ca/article/view/8258
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Dirani, A. (2016). Mesures, développement : Le statut de la créativité en question. Éducation et socialisation, 41, 1-15. https://doi.org/10.4000/edso.1676
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Dubet, F. (2010). Déclin de l’institution et/ou néolibéralisme? Éducation et Sociétés, 2010(1), 25, 17-34.
Durkheim, É. (1922). Éducation et sociologie. Presses universitaires de France.
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Lubart, T. (2023). Homo creativus: approche différentielle. L’Année psychologique, 123, 413-423.
Marcelli, D. (2023). Entre destructivité et créativité, la fierté! Où est le point d’inflexion? Enfances & Psy, 2023(3), 97, 169-180. https://doi-org.merlin.u-picardie.fr/10.3917/ep.097.0169
Potot, S. (2020). Accueillir des enfants dits "roms roumains" dans l’école républicaine, le système éducatif français face à la catégorisation socioculturelle. Agora débats/ jeunesses, 84(1), 53-66. https://doi.org/10.3917/agora.084.0053
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Autres :
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Organisation de coopération et de développement économiques [OCDE]. (2024). Résultats du PISA 2022 (Volume III – version abrégée): La pensée créative en milieu scolaire. PISA. https://doi.org/10.1787/b04a0009-fr
Les propositions devront être résumées en un maximum de 2000 caractères, espaces compris, sans compter la bibliographie (normes APA), en vue d’une communication d’environ 20 minutes. Indiquez votre nom, prénom, laboratoire ou université de rattachement, titre de la communication et axe choisi. Les propositions seront anonymisées par le comité d’organisation et relues en double aveugle par des membres du comité scientifique, tou·tes enseignant·es-chercheur·euses expérimenté·es.
Afin d’ouvrir l’événement, notamment aux étudiant·es souhaitant découvrir le monde de la recherche, une communication par poster est proposée, réservée aux étudiant·es de master.
Résumé : 2000 caractères maximum, décrivant l’objet du poster et son inscription dans l’une des thématiques du colloque.
Date limite de soumission du résumé : 14 février.
Date limite de soumission du poster finalisé : 13 mai.
Calendrier
Pour le vendredi 14 février : Dernier délai pour envoyer les propositions de communication à
l’adresse suivante : seminairecreativiteidentite@gmail.com
Lundi 31 mars au plus tard : retour du comité scientifique sur votre proposition.
Phase d’inscription au colloque pour les participants et les spectateur·ices. L’inscription est
gratuite, mais obligatoire. Elle se réalisera par l’envoi d’un mail, toujours à la même adresse :
seminairecreativiteidentite@gmail.com
Mardi 13 mai : réception des posters pour les communications par ce biais, afin que nous
puissions les imprimer.
Mardi 20 et mercredi 21 mai : Colloque (uniquement en présentiel) de 9h à 17h15 au Logis
du Roy à Amiens. Les déjeuners du midi seront pris en charge pour l’ensemble des
communicant·es, y compris les communicant·es par poster.